Pieds nus, barefoot et chaussures minimalistes

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Pieds nus, Barefoot et chaussures minimalistes

Pieds nus se traduit « Barefoot » en anglais. Un mot que vous avez peut-être déjà entendu. Il désigne également aujourd’hui une « nouvelle » façon de marcher. Elle remonte en réalité à nos racines de bipède et concerne encore de nombreuses personnes à travers le monde ! L’heure est à l’observation de nos pieds, de nos chaussures. De ce qui nous relie à la terre, de ce qui influence notre posture, notre proprioception. Le constat qui est fait par de plus en plus de spécialistes est que nos chaussures influencent gravement notre équilibre corporel. Les biomécaniciens, posturologues, podologues, kinésithérapeutes, ostéopathes, le tout-un-chacun, nombreux sont ceux à porter de plus en plus d’attention aux pieds. Et que découvre-t-on ? Qu’ils sont bien trop souvent enfermés dans des chaussures…

Qu’est-ce qui pose problème avec les chaussures ?

1) La forme

a- Hallux Valgus

Si vous observez une chaussure standard, vous remarquerez peut-être sa forme. Une forme arrondie ou pointue au niveau des orteils. Une forme qui n’est absolument pas anatomique. Autrement dit, les orteils sont obligés, pour y entrer et y rester, de s’adapter au moule. Hors, chose étonnante, les chaussures pour tout petits sont larges au bout, de manière à ce que les orteils aient l’espace de s’étaler. Alors, pourquoi les chaussures s’affinent-elles au fur et à mesure que le pied grandit ? Une histoire de look, de style ? Toujours est-il que cette pointe au niveau du gros orteil ne lui permet pas de rester dans son axe. Cela entraîne chez un grand nombre de personnes un hallux valgus. Ou un gros orteil en marteau, qui courbe l’échine vers ses voisins. Cet hallux valgus, assez douloureux chez certains, est légèrement récupérable si on s’y prend à temps. S’il ne l’est pas, c’est l’opération de redressement qui règle le problème temporairement, pour une dizaine d’années environ. Ensuite, il faut réopérer.

b- Équilibre

Autre soucis, cet écrasement des orteils rend l’équilibre plus précaire. Plus la surface sous notre pied est grande, proportionnellement à notre poids et à notre taille, plus notre équilibre sera bon. Évidemment, on peut travailler la tonicité du corps, s’assurer que l’oreille interne assure son travail correctement mais si votre base est recroquevillée, votre équilibre en pâtira.

c- Moulage

L’autre forme inadéquate que l’on peut trouver est celle du réceptacle. Si votre chaussure est préformée, elle ne correspond pas à la forme initiale de votre pied, qui est unique. C’est le cas de certaines sandales d’été à rebord et moulées mais également de nombreuses autres chaussures. Votre pied sera donc obligé de s’adapter à une forme unique et constante qui n’est pas anatomique pour lui. Ceci peut créer des tensions, un dysfonctionnement de certains muscles et une posture différente.

2) Le talon

Messieurs, ne passez pas tout de suite au paragraphe suivant, tout le monde est concerné ! Eh oui, observez-bien vos chaussures ! Même pour les femmes qui marchent déjà avec des chaussures « plates », il est bien présent… Il mesure de quelques millimètres à plusieurs centimètres. Si vous mesurez la hauteur entre votre pied et le sol sur toute sa longueur, vous verrez bien la différence.

a- Amorti

Le talon doit amortir les chocs sous son impact avec le sol ? Arrêtons ici le mystère, sous la plupart des chaussures de ville, le talon est bien trop dur pour amortir quoi que ce soit. En ce qui concerne les baskets dont le talon est mou, l’intérêt peut éventuellement résider dans l’amorti d’un pied traumatisé qui court sur du bitume ou du sol bien dur. Un pied douloureux, arthrosé, y verra un réconfort. Mais pour un pied en bonne santé, marcher ou courir sans amorti extérieur n’est pas problématique. Puisque l’amorti se fera alors à l’intérieur de votre corps. Tout votre corps va développer des pouvoirs que vous ne soupçonnez pas ! Votre pied ne se déroulera plus de la même façon. Votre façon de poser votre pieds ne sera plus la même. Les muscles ordinairement endormis dans des chaussures classiques prendront le relais, dans votre cheville, dans votre jambe et dans tout le reste du corps ! Si vous vous habituiez tranquillement, dès petit ou devenu grand, à marcher dans un premier temps puis à courir sans talon, vous seriez très surpris des compétences de votre corps.

b- Bascule du poids du corps

La deuxième problématique du talon est de projeter le poids du corps vers l’avant. Les conséquences ne seront pas les mêmes chez chacun. Toute la mécanique du corps répond à un ensemble de critères qui ne sont pas les mêmes pour tous. Ainsi, chez l’un, cela entraînera un verrouillage au niveau des genoux, chez l’autre un bassin qui bascule vers l’avant ou vers l’arrière. De cette bascule, la colonne s’adaptera en verrouillant aussi certaines zones. On pourra remonter ainsi jusqu’aux cervicales. Si le corps est bien fait, cette adaptation sera néanmoins préjudiciable sur du moyen à long terme. Les conséquences varieront de crispations en douleurs, de raideurs en blocages musculaires ou articulaires. Bien souvent, ce sont les muscles postérieurs qu’il faudra assouplir en premier puisqu’ils sont sans cesse raccourcis.

c- Entorse

La troisième problématique est qu’un talon nous surélève légèrement du sol. Que se passe-t-il lorsque votre talon rencontre un cailloux, une aspérité de terrain ? Le pied se tord sous l’effet de l’obstacle. En temps normal, un pied et une cheville solides et souples, un corps qui sent le sol et réactif, saura nous prévenir de la blessure. Hors un pied fragilisé aux chevilles peu musclées, avec une proprioception biaisée, se défend déjà beaucoup moins bien. Mais imaginez qu’il soit aussi plus haut par rapport à un creux, une bosse ou une pierre, du fait du talon ! Le pied se tord, n’a pas la force d’épouser le terrain ou de se récupérer car il est contraint par une chaussure à talon et à semelle rigide. Résultat : de micro-traumastismes, une foulure, une entorse…

3) La semelle

Voyons un peu ce que nous réserve la semelle ! Elle est tout simplement trop rigide dans la plupart des cas. Une semelle rigide (c’est-à-dire qui ne se courbe pas facilement avec les mains) ne permet pas au pied de se dérouler correctement. Imaginez danser avec une combinaison néoprène rigide… À moindre échelle, le pied se fatigue et certains muscles sont mal ou sous utilisés. À moyen – long terme, le pied se fragilise, s’affaiblit, se crispe. Comme vu ci-dessus, la semelle rigide sur terrains accidentés nous expose plus facilement aux traumatismes telles que foulures, entorses.

Tous ses aspects nous font facilement comprendre pourquoi tant de gens souffrent de douleurs aux pieds ou, sans avoir pu faire le lien, de certaines douleurs au dos, aux genoux, aux cervicales, de raideurs musculaires à l’arrière des jambes ou aux fessiers, etc.

4) La connexion à la Terre

Ce paragraphe n’est pas réservé qu’aux hippies ! Une chaussure nous isole de sensations extraordinaires ! Surtout lorsqu’elle n’est pas une chaussure minimaliste et qu’elle a une semelle rigide ou épaisse ! Vous sentez la densité du sol sous vos pieds, les reliefs, les textures, la température. Vous êtes évidemment plus attentifs à ce sur quoi vous posez vos pieds. Votre panel de sensations s’enrichit.

En faisant l’expérience du barefoot, on peut accéder à un autre niveau de connexion. Pour ceux qui en font l’expérience régulièrement, marcher pieds nus étend notre conscience. Notre conscience de ce qui se trouve sous nos pieds mais plus largement, notre conscience du monde et du fait que, par le sol, nous sommes tous reliés. Marcher pieds nus peut donner le sentiment d’appartenir à la Terre et donc aussi l’envie de la protéger, d’en prendre soin.

Marcher pieds nus accroît notre sens du touché, notre vigilance, ralentit le rythme, augmente notre connexion à la Terre.

Pour les personnes attentives à la gestion des déchets, elles y verront évidemment l’avantage de moins consommer. L’industrie textile et de la chaussure génère beaucoup de polluants et aucun recyclage. En ce qui concerne la chaussure minimaliste, c’est toujours de la matière en moins pour la fabrication. Les chaussures minimalistes étant généralement beaucoup moins fournies. Une marque propose même le recyclage des chaussures usagées. Ils changent ou réparent les parties abîmées et refont une nouvelle chaussure. Certains fabriquant utilisent des chutes de matière (par exemple le cuir utilisé pour d’autres choses) ou recycle des matériaux (comme le polyester) pour les intégrer aux chaussures.

5) Un maintien inadéquat

En ce qui concerne les sandales d’été plates (tatanes, claquettes, tongs), le pied s’y trouve assez libre. Mais c’est justement le bémol, il y est trop libre. Une chaussure qui s’ôte (ou qui saute) si l’on secoue le pied dans un sens ou dans un autre n’est pas une bonne chaussure. Le pied se crispe lors de la marche ou de la course pour ne pas perdre la sandale. La chaussure glisse vers l’avant dès que les orteils sont plus bas que le talon. Si le pied est occupé à maintenir sa chaussure, il ne peut pas être optimal dans le reste de ses fonctions.

Les alternatives : marche pieds nus et chaussures minimalistes

1) Marcher pieds nus (ou Barefoot)

a- Transition

Avant de vous lancer corps et âme dans l’expérience, essayez déjà tranquillement chez vous. Dehors, dans le jardin, de temps en temps. Passer d’une chaussure normale, après des années de formatage du pied, à la marche pieds nus ou à une chaussure minimaliste, peut s’avérer douloureux. En effet, beaucoup de muscles se sont atrophiés, raccourcis, la peau est fine. Cela peut amener très vite à des fascites plantaires (inflammation de certains fascias ou tissus musculaires), à des petites blessures. Il existe de petits tapis à picots en plastique pour stimuler toutes les zones du pied. Pour les pieds très sensibles, vous pouvez vous fabriquer cela en collant sur un carton rigide diverses matières. De petits objets (perles, bouchons de plastique, corde, petits cailloux ou grains de riz) peuvent faire l’affaire pour habituer le pied en marchant doucement dessus. A moins que vous n’ayez une petite forêt à portée de pieds ! Le principal problème réside surtout dans le talon. Passer au « sans talon » (= « 0 drop » en anglais) étire toute la chaîne postérieure. On prendra le temps qu’il faut pour assouplir les mollets, les jumeaux, les ischios-jambiers, les fessiers, etc.

Nous vous recommandons la lecture de ce petit livre intéressant et facile : « Va nu-pieds ! En route vers le minimalisme… » de Katy Bowman. Elle y explique clairement et simplement comment faire une transition au moyen d’assouplissements et de postures.

https://www.ressources-primordiales.fr/bibliographie-de-katy-bowman/

b- Bémols

Certains verront à cette pratique l’inconvénient du regards des autres. La chaussure a été considéré il y a quelques siècles comme démarquant définitivement les bourgeois des bouseux. Dans nos pays « modernes », marcher nus-pieds est extrêmement peu pratiqué. Cela y est assimilé au vagabondage ou à la rébellion. Il faut pouvoir assumer sa pratique barefoot selon son bon-sens, sa logique. L’expliquer aux gens peut les aider à changer leur regard.

Un autre inconvénient est celui d’un pied exposé aux objets coupants ou blessants. L’attention développée dans ce type de marche évite déjà bien des problèmes. De plus, de la corne se fabrique sous votre pied avec le temps. Sans couper la sensibilité, elle en atténue néanmoins les effets et protège le pied. Mais si cela vous préoccupe, il existe les chaussures minimalistes.

2) Les chaussures minimalistes

Une chaussure minimaliste s’inscrit dans le courant « Nu-pieds » ou Barefoot. Elle est minimaliste en ce sens qu’elle est simple et possède peu de matière. Marcher avec une chaussure minimaliste amène une sensation de légèreté, de liberté, de connexion.

C’est une chaussure dont la boîte à orteils est grande pour leur laisser la place de s’étaler. D’une manière générale, les pieds s’y trouvent moins serrés. Elle ne possède aucun talon. Sa semelle fine et souple (environ 4mm minimum). Pour une sandale, elle possède ce qu’il faut de sangle pour que le pied soit maintenu. Enfin, elle est légère du fait du peu de matériel utilisé. Il existe des chaussures minimalistes d’hiver. À ce moment là, les caractéristiques resteront les mêmes mais avec une semelle légèrement plus épaisse ou plus isolante. L’espace dans la chaussure étant plus important, on aura la place de porter des chaussettes épaisses, là où ordinairement, on serait trop serré. Enfin, le pied étant plus actif, il se réchauffe beaucoup plus naturellement que dans une chaussure classique.

Il existe désormais de nombreuses marques sur le marché mais quasiment aucune boutique en France. Attention à bien vérifier votre pointure avant de commander. En général, les sites donnent les moyens de bien calculer votre pointure à la maison. Ne pas hésiter à changer.

Dans tous les cas, son usage ne se fait pas du jour au lendemain. Pensez à habituer doucement votre pied, à opérer une transition vers ce type de chaussures (voir section sur la marche pieds nus).

Merci de votre lecture et bonne expérience à ceux qui tenteront l’aventure !